« Le corps n'est pas rigide, c'est l'esprit qui l'est »
Sri K. Pattabhi Jois
Introduction
La série primaire d’Ashtanga, ou Yoga Chikitsa, prend son nom du terme sanskrit Chikitsa, qui se traduit largement par «thérapie» mais peut également être compris comme s’appliquer consciemment ou prendre soin. Plus qu’une simple séquence de postures, la série primaire est une pratique dynamique et structurée visant à purifier le corps et l’esprit à travers le parfait mariage de la respiration, du mouvement et de la concentration. Elle constitue la fondation du système Ashtanga Yoga, en travaillant en profondeur sur les muscles, les organes internes et les systèmes énergétiques retrouvés dans les traditions yogiques. Elle développe la souplesse, la force et l’endurance autant physique que mentale.
Ce qui distingue l’Ashtanga des autres pratiques est l’accent mis sur les vinyāsas, ces mouvements de transition qui relient les postures dans un flot continu, synchronisé avec une respiration contrôlée et rythmée. Ce mariage d’un type de respiration connu sous le nom d’Ujjayi Prānāyāma, et du mouvement génère une chaleur interne qui permet non seulement de détoxifier le corps mais aussi d’apaiser le mental.
La série primaire aborde les postures dans un ordre précis et invariable. Chaque posture prépare le corps à la suivante, augmentant progressivement la complexité des mouvements et l’intensité des étirements. Des salutations au soleil initiales aux flexions avant profondes, en passant par les torsions, les postures debout, les équilibres et les inversions, la série primaire offre un cheminement complet qui invite à l’exploration de soi et au dépassement des limites physiques et mentales.
J’enseigne cette pratique aux yogis de tous les niveaux. Elle demande certains ajustements en fonction de la forme physique des participant.es, mais même les retraités actifs font la série primaire. C'est une pratique qui mérite qu’on s’y attarde car elle dévoile véritablement ses subtilités et ses bienfaits au fil du temps, à travers une pratique régulière et disciplinée. Elle développe non seulement la force physique, mais aussi l’attention soutenue. C’est à travers cette répétition attentive que l’on commence à percevoir la véritable essence du yoga : l’union du corps, de l’esprit et de la respiration.
Contenu de l'article
La Structure de la Série Primaire : Une Vue d’Ensemble
Une structure fixe, une progression vers la complexité.
La pratique en images : première moitié
Une image vaut milles mots... Salutations au soleil, postures debout et postures assises.
Pratique en images : seconde moitié et séquence finale
Le niveau de complexité s'accentue. Équilibre sur les mains, postures en extension, postures inversées et Savasana
Détoxifiante ? Mon opinion sur cet effet prétendu de la pratique
Sommes-nous vraiment toxique ? Un peu de science pour éclairer cet aspect de l'Ashtanga... et du Yoga en général
La Structure de la Série Primaire : Une Vue d’Ensemble
Six parties pour une pratique complète
#1 Sūrya Namaskāra A et B
Les salutations au soleil forment l'introduction classique de la série primaire, permettant de générer de la chaleur interne et de synchroniser le mouvement avec la respiration. Sūrya Namaskāra A est plus simple, tandis que la version B introduit Utkatāsana et Vīrabhadrāsana I, engageant davantage les muscles des jambes. Cette phase prépare à la pratique en échauffant le corps et en stimulant l'énergie.
#2 Les postures debout
Les postures debout forment la fondation de la série et permettent de développer la stabilité, l’équilibre et la force. Elles incluent des poses telles que Pādāṅguṣṭhāsana et Trikoṇāsana, qui favorisent l’allongement des chaînes musculaires postérieures et l’ouverture des hanches. On y retrouve aussi des postures asymétriques, comme Parivṛtta Trikoṇāsana et Parivṛtta Pārśvakoṇāsana, qui introduisent la notion de torsion et d’équilibre dans la séquence.
#3 Les postures assises
Cette section marque une transition vers des postures plus introspectives. On commence souvent par Daṇḍāsana pour aligner la colonne vertébrale. Des postures comme Paścimottānāsana et Jānu Śīrṣāsana favorisent l’étirement intense de l’arrière du corps, tandis que Marīchyāsana propose des combinaisons de torsions et de flexions avant. Ces postures travaillent à la fois sur la souplesse et la purification des organes internes grâce aux torsions.
#4 Navasana (Posture du bateau)
Cette posture centrale est une étape clé dans la série primaire, demandant un engagement profond des muscles abdominaux. Elle est souvent répétée plusieurs fois pour renforcer le centre du corps et dynamiser l’énergie dans la pratique. Elle marque également la fin de la première moitié de la série, offrant un moment pour observer la chaleur interne créée.
#5 Postures de la seconde moitié
Cette section introduit des postures plus complexes, comme Bhuja Pīḍāsana (posture de la pression sur les bras), où la force du haut du corps et l’équilibre sont mis à l’épreuve. On retrouve également des postures au sol comme Kūrmāsana et Supta Kūrmāsana, qui sollicitent une grande flexibilité des hanches et des épaules. Garbha Piṇḍāsana et Kukkuṭāsana demandent une maîtrise du contrôle du corps et de la respiration.
#6 La séquence finale
La séquence finale commence avec des backbends (flexions arrière), notamment Ūrdhva Dhanurāsana, qui mobilisent intensément la colonne vertébrale et ouvrent le cœur. Elle inclut aussi des inversions comme Salamba Sarvāṅgāsana (la chandelle) et Śīrṣāsana (la posture sur la tête), qui inversent le flux sanguin et apportent un sentiment de calme et de clarté mentale. Savasana clôture la séquence, permettant au corps de se reposer et d’intégrer les bienfaits de la pratique.
La pratique en images : première moitié
Pratique en images : seconde moitié et séquence finale
Téléchargez la version pdf de la série primaire pour pratiquer à la maison !
Détoxifiante ? Mon opinion sur cet effet prétendu de la pratique
Sommes-nous vraiment toxique ? OK, peut-être que certaines personnes le sont un peu ! ! Mais lorsque l’on parle de « détoxifier le corps » dans le contexte du yoga, et plus particulièrement de l’Ashtanga, cela fait référence à plusieurs processus physiques et énergétiques visant à purifier le corps des toxines accumulées. Voici ce que cela implique plus spécifiquement :
Transpiration
La chaleur générée par la pratique intense, notamment grâce à la respiration Ujjayi et aux vinyāsas dynamiques, fait transpirer le corps. Les études scientifiques montrent que l'idée que la transpiration détoxifie de manière significative le corps est largement exagérée. La transpiration, qui est composée à 99 % d'eau, sert principalement à réguler la température corporelle. Bien qu'il soit possible d'éliminer des traces de métaux lourds (comme le plomb ou l'arsenic) ou des composés comme le BPA à travers la sueur, ces quantités sont minimes. La majorité des déchets sont en fait éliminées par le foie et les reins, qui filtrent le sang et les éliminent via l'urine.
La chaleur générée par la pratique intense, notamment grâce à la respiration Ujjayi et aux vinyāsas dynamiques, fait transpirer le corps. Les études scientifiques montrent que l'idée que la transpiration détoxifie de manière significative le corps est largement exagérée. La transpiration, qui est composée à 99 % d'eau, sert principalement à réguler la température corporelle. Bien qu'il soit possible d'éliminer des traces de métaux lourds (comme le plomb ou l'arsenic) ou des composés comme le BPA à travers la sueur, ces quantités sont minimes. La majorité des déchets sont en fait éliminées par le foie et les reins, qui filtrent le sang et les éliminent via l'urine.
Les recherches indiquent que, si l'exercice et la transpiration peuvent jouer un rôle dans la santé globale en améliorant la circulation et en réduisant l'inflammation, ils ne sont pas les principaux moyens d'éliminer les déchets (toxines). Le rôle de la transpiration dans la détoxification est donc mineur. En résumé, bien que l'activité physique soit bénéfique pour le bien-être général, il ne faut pas s'appuyer sur la transpiration pour «nettoyer» le corps des toxines.
Circulation et respiration
Une revue systématique (Kuppusamy et al., 2021) explore comment le pranayama améliore la santé cardiovasculaire, en favorisant une meilleure circulation sanguine et une meilleure oxygénation des tissus. L’Ujjayi Prānāyāma (respiration contrôlée et sonore) favorise donc un apport accru d’oxygène et améliore la circulation des poumons jusqu'aux organes. Cela permet au corps de mieux éliminer le dioxyde de carbone et autres résidus respiratoires.
Une revue systématique (Kuppusamy et al., 2021) explore comment le pranayama améliore la santé cardiovasculaire, en favorisant une meilleure circulation sanguine et une meilleure oxygénation des tissus. L’Ujjayi Prānāyāma (respiration contrôlée et sonore) favorise donc un apport accru d’oxygène et améliore la circulation des poumons jusqu'aux organes. Cela permet au corps de mieux éliminer le dioxyde de carbone et autres résidus respiratoires.
Digestion
Cette même revue systématique (Kuppusamy et al., 2017), souligne également l’impact positif des techniques respiratoires sur le métabolisme et la digestion en stimulant les organes abdominaux. Une autre étude se concentre sur les effets du yoga sur la digestion chez les personnes âgées, mettant en évidence son rôle dans l'amélioration des symptômes des troubles gastro-intestinaux, notamment le syndrome de l'intestin irritable (IBS), grâce à une meilleure régulation du stress et de l'inflammation. Le yoga favorise clairement les fonctions importantes du système digestif, notamment l'élimination des déchets (les matières fécales). Cependant, il n'élimine pas des supposées toxines internes... Mais on pourrait supposé qu'une meilleure élimination des matières fécales empêchent l'absorption de certaines toxines. On est donc loin d'une preuve ici !
Cette même revue systématique (Kuppusamy et al., 2017), souligne également l’impact positif des techniques respiratoires sur le métabolisme et la digestion en stimulant les organes abdominaux. Une autre étude se concentre sur les effets du yoga sur la digestion chez les personnes âgées, mettant en évidence son rôle dans l'amélioration des symptômes des troubles gastro-intestinaux, notamment le syndrome de l'intestin irritable (IBS), grâce à une meilleure régulation du stress et de l'inflammation. Le yoga favorise clairement les fonctions importantes du système digestif, notamment l'élimination des déchets (les matières fécales). Cependant, il n'élimine pas des supposées toxines internes... Mais on pourrait supposé qu'une meilleure élimination des matières fécales empêchent l'absorption de certaines toxines. On est donc loin d'une preuve ici !
Purification énergétique
Dans la philosophie du yoga, la détoxification ne se limite pas seulement au plan physique. En bougeant et en travaillant avec le souffle, l’énergie (prāṇa) est mobilisée et redistribuée, débloquant ainsi les nāḍīs (canaux énergétiques) et permettant à l’énergie vitale de circuler plus librement dans le corps. Ici, la science n'a rien à dire !
En sommes, la science indique que la pratique du yoga, comme plusieurs autres activités physiques, a des effets positifs sur les fonctions normales du corps. Et heureusement, nous ne sommes pas toxiques à la base !
Dans la philosophie du yoga, la détoxification ne se limite pas seulement au plan physique. En bougeant et en travaillant avec le souffle, l’énergie (prāṇa) est mobilisée et redistribuée, débloquant ainsi les nāḍīs (canaux énergétiques) et permettant à l’énergie vitale de circuler plus librement dans le corps. Ici, la science n'a rien à dire !
En sommes, la science indique que la pratique du yoga, comme plusieurs autres activités physiques, a des effets positifs sur les fonctions normales du corps. Et heureusement, nous ne sommes pas toxiques à la base !
Références
Liu, K. K., & Poon, C. C. (2012). Sweat Analysis for Health Monitoring. Annual Review of Analytical Chemistry, 5, 243-264.
Cette revue explore les biomarqueurs retrouvés dans la sueur et la pertinence de l'analyse de la sueur pour surveiller certains aspects de la santé, mais elle souligne également les limites de la transpiration dans l'élimination des toxines.
Sears, M. E., et al. (2012). Arsenic, cadmium, lead, and mercury in sweat: A systematic review. Journal of Environmental and Public Health.
Cet article examine la présence de métaux lourds dans la sueur et leur relation avec la détoxification du corps, tout en soulignant que le foie et les reins sont les principaux acteurs de l'élimination des toxines.
Kuppusamy M, Kamaldeen D, Pitani R, Amaldas J, Shanmugam P. (2017) Effects of Bhramari Pranayama on health - A systematic review. J Tradit Complement Med. Mar 18;8(1):11-16.
Kuppusamy M, Kamaldeen D, Pitani R, Amaldas J, Shanmugam P. (2017) Effects of Bhramari Pranayama on health - A systematic review. J Tradit Complement Med. Mar 18;8(1):11-16.
Arumugam, V., Balakrishnan, A., Kumar, V., Ponnurangam, R., Sathya, A., Annamalai, G. (2024) Physiological effects of pranayama on clinical practice: A mini-review. International Journal of Yogic Human Movement and Sports Sciences.
Ces articles explorent comment des techniques comme l'Ujjayi Pranayama influencent positivement la santé cardiaque, réduisant la pression artérielle et améliorant l'efficacité de la circulation sanguine.
Shree Ganesh HR, Subramanya P, Rao M R, Udupa V. Role of yoga therapy in improving digestive health and quality of sleep in an elderly population: A randomized controlled trial.
Ces articles explorent comment des techniques comme l'Ujjayi Pranayama influencent positivement la santé cardiaque, réduisant la pression artérielle et améliorant l'efficacité de la circulation sanguine.
Shree Ganesh HR, Subramanya P, Rao M R, Udupa V. Role of yoga therapy in improving digestive health and quality of sleep in an elderly population: A randomized controlled trial.
Cet article montre les effets du yoga sur la digestion chez une population âgée, mettant en évidence son rôle dans l'amélioration des symptômes des troubles gastro-intestinaux, notamment le syndrome de l'intestin irritable (IBS), grâce à une meilleure régulation du stress et de l'inflammation.
Philippe
Philippe